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23 mai 2016

Tumeur et portable : Une nouvelle étude contradictoire ?

Tumeur et portable : Une nouvelle étude contradictoire ?
jay / electrosensible.info, 23 mai 2016

Décidément, la question des ondes électromagnétiques de la bande des radiofréquences et de leurs effets possibles sur la santé n’en finit pas de faire couler de l’encre. Pour l’instant, la littérature scientifique est assez contradictoire sur le sujet des tumeurs au cerveau lié à une exposition au téléphone portable, plusieurs études démontrent une augmentation des tumeurs pour les utilisateurs intensifs, la dernière en date, l’étude CERENAT démontrait un risque accru de méningiome après plus d’une demi-heure d’exposition par exemple. En contre-partie, d’autres études, soit ne démontrent pas d’augmentation notable depuis l’arrivée de la téléphonie mobile, ou soit ne montrent tout simplement pas de lien statistique entre l’utilisation du portable et de ces types de tumeurs.

En mai dernier, une nouvelle étude s’est rajoutée à la liste des études épidémiologiques rassurantes et elle est venue contre-balancer les études qui étaient positives concernant les radiofréquences et les cancers du cerveau. L’équipe du professeur Chapman a publié ses travaux dans la revue internationale de l’épidémiologie du cancer sur l’évolution de ce type de maladie depuis l’arrivée en 1987 de la téléphonie mobile en Australie. Ses conclusions sont qu’il n’y aucune augmentation de cancer du cerveau entre 1982 et 2012 dans tous les groupes d’âge excepté celui des plus de 70 ans dont la différence de tendance commencerait bien avant 1987, donc probablement sans corrélation avec l’utilisation du téléphone portable mais serait plutôt lié à un meilleur diagnostic de la maladie.

Afin de réaliser son étude, l’équipe avait à disposition les données du registre national des cancers d’Australie (AIHW) dans lequel est obligatoirement référencé les différents cas de cancer qui sont diagnostiqués dans la population. Parmi ces données, il y a les détails cliniques du cancer, l’age et le sexe de la personne malade entre autres. À ce niveau-là, les données seraient donc assez solides, en revanche les données concernant le taux de pénétration du téléphone portable et de son utilisation proviennent d’extrapolation, idem pour le laps de temps entre l’exposition et l’apparition du cancer qui est fixé à 10 ans et l’augmentation au bout de 20 ans. Quant au nombre de personnes se classant dans les utilisateurs intensifs, il a été fixé à 19% de la population australienne.

Le modèle de l’étude était de comparer l’actuelle incidence des tumeurs par rapport à une incidence extrapolé si l’exposition au portable était bien la cause de ces tumeurs dont l’augmentation se ferait ressentir après 10 ans d’exposition. Les scientifiques ont donc tablé sur une augmentation de 50% des tumeurs et dans le cas présent, si l’hypothèse était vérifiée, il y aurait dû avoir 1866 cas de cancer en 2012 alors que dans la réalité, il n’y en a eut que 1435. La seconde hypothèse était que 19% de la population faisait partie du groupe des utilisateurs intensifs et pour lequel une augmentation de 150% des cancers était attendue. Dans l’éventualité ou l’hypothèse était vérifiée, il y aurait 2038 cas de cancer en 2012 au lieu des 1435 dans la réalité. Aucune des hypothèses du modèle de ces scientifiques concernant l’augmentation des cas de cancers liés au portable s’est donc vérifiée.

Pour la petite histoire, cette étude aurait dû sortir en février, quasiment au même moment que le documentaire australienWI-FRIT qui était beaucoup moins rassurant concernant les risques des radiofréquences. Mais il s’avère que des modifications ont dû être nécessaires pour qu’elle soit publiée, le professeur Chapman devant se contenter d’une interview dans un article en ligne dans le journal Sydney Morning Herald pour dire que le documentaire sur la question des cancers et des radiofréquences, c’était de « la merde ». En plus de cela, ce professeur aurait eu dans le passé des liens avec l’industrie des télécoms, d’une part dans un précédent article scientifique qui aurait été en partie financé par l’Association Australienne des Télécommunications Mobile ou encore dans un livre sur l’avantage du portable dans les sauvetages où le professeur Chapman fait partie des auteurs, mais aussi… l’ATMA…

Le financement de cette nouvelle étude n’étant pas renseigné, il n’en a pas fallu plus pour susciter une vive réaction chez certains qui se sont engouffrés dans la brèche du conflit d’intérêts, mais à tort. En effet, la plupart des informations étant publiques, l’ATMA ne s’est contenté que de donner les données liées au pourcentage d’abonné parmi la population australienne, donc le conflit intérêt est peu probable concernant le financement en lui-même. D’autres reproches ont été faits au sujet de certaines extrapolations dans l’étude comme le temps entre l’exposition et l’apparition des tumeurs fixé à 10 ans, mais qui a été repris de l’étude du professeur Hardell qui elle démontre un lien statistique positif entre tumeurs et portable. Pareil pour les 19% de la population australienne qui serait des utilisateurs intensifs, mais là encore, c’est basé sur l’étude Interphone qui elle aussi démontrait un lien statistique positif.

Il n’en reste pas moins que cette étude présente certaines limites comme l’admettent ses auteurs, notamment sur le fait qu’il n’y ait aucune donnée sur l’utilisation individuelle du portable (forfaits personnel/professionnel, moyenne d’utilisation, type d’utilisation, autres expositions, etc…) a contrario de l’étude CERENAT qui avait fait une enquête sur les habitudes d’utilisation du portable auprès des malades et de leur famille. Auquel s’ajoute des données manquantes comme le nombre de forfaits durant les périodes entre 1987-1990 et 1992-1997 qui a été comblée par une interpolation linéaire. De plus, la position de la tumeur n’est pas prise en compte ni d’ailleurs d’autres tumeurs du cerveau qui sont suspectées d’être causées par une exposition au portable, il y a les cancers du type neurinome acoustique ou du nerf trijumeau qui eux ne semblent pas être comptabilisés dans l’étude, critique que l’on peut appliquer aux autres études épidémiologiques.

Au final est-ce que cette étude disculpe totalement le rôle des radiofréquences dans les cas de cancer ? Pas vraiment au vu de la qualité de certaines données et des résultats basés sur des extrapolations de données déjà extrapolées. Mais tout comme les études épidémiologique qui montre un lien statistique, là aussi, il peut y avoir des critiques sur la méthodologie comme ne se prive pas certains scientifiques engagés. Surtout que le portable n’est qu’une source d’exposition, on oublie aussi que les DECT sont une autre source d’exposition aux champs électromagnétiques et qu’ils ont été introduits avec la norme CT0 dès 1980. On peut donc se poser la question si l’augmentation des tumeurs constatée dans le groupe d’âge des 70 ans et plus, est réellement lié à un meilleur diagnostic ou peut être à l’apparition de ces autres téléphones sans fil, une autre étude épidémiologique en vu ?

@+ Jay

https://electrosensible.info/2016/05/23/tumeur-et-portable-une-nouvelle-etude-contradictoire/

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